En marge des six ans de massacres perpétrés dans la région de Beni, les étudiants ressortissants du territoire de Beni, vivant à Kisangani, ont organisé ce jeudi 16 octobre un débat patriotique dans la grande salle de la cathédrale de Kisangani, peu après une messe d’action de grâce dite en mémoire de milliers de civils tués à Beni.
Il s’est agi d’un échange d’idées ayant pour thème » la passivité de l’Etat Congolais dans la situation sécuritaire dans l’Est de la RDC. »
Dans ces échanges, les étudiants regroupés au sein d’une association AERB ont dénoncé la faillite de l’État congolais dans la situation sécuritaire qu’écume la région de Beni et ses environs, il y a des décennies. Cette situation est caractérisée par les massacres de civils attribués aux rebelles étrangers ADF/MTM, les viols et plusieurs autres affres de guerre.
Elle a occasionné le déplacement de milliers de civils, craignant les différentes représailles ADF. Ces déplacés vivent cependant dans des conditions humanitaires précaires, parfois dorment dans des écoles et à la belle étoile dans les endroits jugés sécurisés.
Pour Osée Ngeleza, Président de l’AERB, il s’agit d’un devoir civique, celui de porter haut la voix des leurs qui sont victimes depuis 6 ans de tueries audieuses.
‹‹ 6 ans après, jour pour jour, nos frères, sœurs et parents sont décédés et décèdent encore. Nous avons de la tristesse, du chagrin quand on apprend chaque jour qu’on tue les innocents, ça nous fait mal et ça perturbe notre quotidien ici à Kisangani. La situation d’insécurité à Beni va de mal en pis. Il y a l’indifférence coupable du gouvernement qui approuve sa faillite sur terrain, 6 ans , rien n’est fait. Les morts sont toujours comptés ›› lance-t-il.
Et d’ajouter que « la situation économique des étudiants ayant les parents à Beni est très compliqué ici à Kisangani. Nous appelons à l’éveil de la conscience de tout un chacun, l’apport de tous, chacun dans ses responsabilités, enfin d’arrêter cette hémorragie sécuritaire.»
Un tableau sombre peint
Jedidia MABELA, activiste pro changement et l’un des conférencier du jour n’est pas allé par le dos de la cuillère, analysant la montée démesurée de tueries dans la région de Beni, six ans après.
Pour ce militant, touché par les pleurs de ses concitoyens, les causes de massacres sont sans ambages:
- la faillite de l’État Congolais,
- l’hypocrisie de la Communauté Internationale,
- les rôles nocifs de tous les acteurs internationaux qui alimentent la crise pour avoir la main mise sur les ressources naturelles
- et aussi bien la complicité des acteurs locaux.
Mr Mabela évoque, parlant des pistes de sortie de cette crise, une évaluation des responsabilités de tous les concernés dans cette situation.
‹‹ Il faut établir une part de responsabilité à la fois de la puissance publique, du citoyen et de la communauté internationale dans les massacres de Beni…il faut s’arrêter et évaluer la contribution de toutes ces organisations internationales. Que le gouvernement puisse comprendre que la paix est la priorité des priorités. Un État protecteur avant un État de droit.›› propose-t-il.
Le cœur comme une solution
Pour KYAWEDE Kevine, étudiant à l’UNIKIS, venu de Beni, la piste de solution c’est le cœur. Il s’est dit avoir vécu des massacres en sa face.
En 2018, en congé, Mr Kyawede, dit avoir un souvenir impérissable et estime qu’il faut avoir seulement le cœur.
‹‹ 6 ans correspondent à tout un mandat d’un président. Si les 6 ans n’ont pas su donner solution, que dire de la plus grande des pistes ? La solution pour le moment, c’est le cœur.» pense-t-il.
Et poursuit que « Le cœur veut dire que chacun de nous pense à ce qu’il peut faire. Réveiller la conscience…››
Informons que le premier massacre des civils à Beni a eu lieu le 15 octobre 2014. Ce jour-là, au moins 27 personnes avaient été abattus à l’arme blanche et par balles, lors d’une attaque attribuée aux rebelles ougandais des ADF au quartier Ngandi, au Nord-Est de cette ville du Nord-Kivu.
Six ans après, les conséquences de cette tuerie et d’autres attaques des ADF se font toujours ressentir au quartier Ngadi et ses environs.
Six ans après, le bilan de ces atrocités est ahurissant.
Serge SINDANI et Gaston MUKENDI